22 Aoû FMD 2016: Conversation avec Scott Schuman, The Sartorialist
Pour la dernière conférence de la série proposée par le Festival Mode & Design, Stéphane Le Duc recevait Scott Schuman, fondateur du blogue The Sartorialist. L’occasion de revenir sur la carrière de ce pionnier des blogues de mode. Scott Schuman fut en effet l’un des premiers à photographier les sorties de défilés, où il captait la diversité de la mode. Il fut également l’un des premiers blogueurs à vivre de son blogue, grâce à ses pages de streetstyle dans le magazine GQ ou sur Style.com, dans un premier temps. Puis grâce à ses contrats en tant que photographe de mode pour les plus grands noms de l’industrie, et la publication de ses livres de photographie de rue. Échange avec un homme entrepreneur, dont la vision continue d’influencer la planète mode à l’échelle globale.
Scott Schuman, avant The Sartorialist
La vente était la seule chose que je savais bien faire. J’ai donc travaillé dans la vente et le marketing pour des designers. J’avais mon propre un showroom. Puis il y a eu le 11 septembre et les ventes de vêtements ont chuté. Il a fallu que je vende mon showroom.
Essais photographiques d’un père au foyer
Après la fermeture de mon showroom, je suis resté à la maison pour m’occuper de mes enfants. Ça a duré deux ans. Chaque jour je m’inquiétais sur ce que j’allais faire ensuite. Mais passer du temps avec ses enfants n’est jamais une mauvaise chose. J’ai commencé par prendre mes enfants en photo. Je m’enseignais la photographie et enseignais en même temps à mes enfants comment voir le monde.
La naissance de The Sartorialist
La première photo publiée en septembre 2005 sur The Sartorialist était celle de Robert Burke, considéré comme l’un des hommes les plus influents de la mode masculine aux États-Unis. Robert Burke était alors directeur de la mode masculine chez Bergdorf Goodman à New York. Sa photo a été prise à la sortie d’un défilé Ralph Lauren.
Engager la discussion
La première fois que j’ai publié un commentaire sous une photo, c’était sous la photo d’une tenue prise dans une vitrine de Bergdorf Goodman. La puissance des photos est qu’elles sont compréhensibles dans monde entier. Mais c’est le texte qui apporte la vision et le contexte. Quand on tient un blogue, c’est important d’avoir un point de vue. Je vois mon blogue comme un talk show où les gens donnent leur opinion. Mon blogue engage la discussion.
Le début d’une carrière de photographe de mode
Les débuts ont été très rapides puisque dès 2006 j’avais ma propre page dans le magazine GQ. Ce n’est pas la qualité de mes images qui ont séduit mais qui je choisissais de photographier. La raison pour laquelle mon blogue a décollé si rapidement dans l’industrie est que je photographiais des personnes cool en train de porter les vêtements des créateurs.
Développer son point de vue
Je suis né dans l’Indiana. J’étais un petit garçon normal mais différent parce que j’étais le seul à connaître la différence entre Gucci et Versace. Je me sentais un peu à l’écart mais c’est ce qui m’a gardé curieux. J’ai toujours l’instinct d’aller quelque part pour voir les choses de mes propres yeux. Avec le temps, j’ai développé mon propre point de vue: ouvert mais affûté. Je n’avais personne pour me challenger, personne à impressionner. C’est ce qui m’a permis d’avoir une vision personnelle forte.
Apprendre la photographie
J’ai appris la mode et la photographie en regardant le Vogue italien dans les années 1990 et au début des années 2000. J’y ai volé de petites choses, en observant comment les photographes comme Lindberg composaient leurs photos, leurs astuces pour insérer une dimension de profondeur.
Photographe de mode pour Vogue
Quand on m’a proposé de photographier mon premier édito signé Scott Schuman pour Vogue, j’étais très excité. Mais je n’ai pas aimé l’expérience. Je n’ai pas aimé le fait qu’il faille attendre plusieurs mois avant de voir les photos publiées, et qu’on ne te prévienne même pas quand elles le sont. Ce n’est pas la façon dont j’aime travailler.
L’influence des photographes
Les photographies de Brassaï m’ont beaucoup influencé. Il photographiait avec une grosse caméra, et pourtant, il arrivait à se faire oublier par les gens dont il capturait les moments de vie. J’ai aussi été beaucoup influencé par Lartigue, qui est selon moi le premier vrai instagrammeur! Il a eu sa première caméra à 7 ans donc il prenait tout en photo. Il documentait sa vie. Il est devenu célèbre quand Avalon a découvert ses nombreux clichés, qui ont été exposés ensuite au MOMA à New York.
Image vs. réalité
Quand je prends quelqu’un en photo je n’essaye pas de prendre une photo de la personne mais de son personnage. Je ne veux pas connaître la vérité mais j’ai mon idée de l’histoire que je veux raconter. C’est pourquoi je ne fais pas du photo-journalisme. Les vêtements sont comme le costume qu’un personnage de fiction porterait. Mon objectif est de faire le portrait de personnages intéressants.
Le voyage: de Milan à l’Afrique du Sud
J’ai toujours été intéressé par la beauté et la diversité du genre humain. J’ai toujours eu une grande curiosité sur le monde. J’aime voyager là où on ne pense pas que les gens sont à la mode. J’aime challenger mes lecteurs pour qu’ils voient les gens différemment. Milan est une superbe ville de mode mais sans beaucoup de variation. On n’y trouve pas la diversité de New York. L’Inde est difficile. C’est bruyant, sale mais génial à la fois. L’Inde est comme l’Italie il y a 50 ans! En Afrique du Sud il y a beaucoup de dignité, d’espoir et de rêves. Je suis heureux de pouvoir être une inspiration pour eux.
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Texte : Sarah Meublat
Photographie: Scott Schuman (images prises lors de la conférence par Gabrielle Ferland)